Sur les pas d’un humaniste de la Renaissance : Michel de Montaigne (3e hellénistes)

Les élèves hellénistes de 3e ont mené un projet sur Montaigne incluant la découverte de ses ouvrages à la bibliothèque Mériadeck, une visite du Bordeaux de Montaigne et de son cénotaphe au Musée d’Aquitaine. Ils vous présentent ici une série de podcasts à la découverte de ce philosophe originaire de notre région, amoureux de l’antiquité et des auteurs grecs et latins.

Épisode 1/8 : Biographie de Montaigne

 

La vie de Michel de Montaigne

 Présentation

Montaigne est né le 28 février 1533 au château de Montaigne dans le Périgord et il est mort à 59 ans, le 13 septembre 1592. Son père Pierre Eyquem de Montaigne, héritier d’une famille enrichie grâce à ses compétences en matière de négociation, est le premier à abandonner sa profession pour vivre en gentilhomme. Il s’attache à donner une bonne éducation humaniste à son fils.

Montaigne, à six ans, après avoir reçu les enseignements d’un précepteur allemand qui ne lui parle qu’en latin, entre au collège de Guyenne à Bordeaux, réputé pour son enseignement. À treize ans, il part en école de droit à Toulouse, ce qui est assez étonnant, car à son époque, l’aîné doit faire une carrière militaire. En 1554, il devient conseiller à la Cour des aides de Périgueux. 

Sa rencontre avec Étienne de la Boétie

Il fait la rencontre d’Etienne de La Boétie au parlement de Bordeaux en 1557 qui lui ouvre de nouvelles voies. Étienne de La Boétie est né le 1ᵉʳ novembre 1530 à Sarlat, une ville du sud-est du Périgord, et il est mort le 18 août 1563 à Germignan, dans la commune actuelle du Taillan-Médoc, près de Bordeaux. C’est un écrivain humaniste, un poète et un juriste français connu pour son livre Le discours de la servitude volontaire.

La peste et les guerres de religion

Le XVIsiècle, est une période marquée par les guerres de religion entre les catholiques et les protestants et par de grandes épidémies de peste. Ces événements dramatiques ont contraint Montaigne à quitter Bordeaux pour se réfugier dans son château en Dordogne. Il écrit dans les Essais :

Car de même que les corps sains sont sujets aux plus graves maladies parce qu’ils ne peuvent être vaincus que par celles-là, de même ma vie très salubre, dans laquelle, de mémoire d’homme, aucune contagion n’avait réussi à prendre pied, finit pourtant par être empoisonnée, produisant d’étranges effets […] J’écrivais ceci à peu près au moment où nos troubles s’acharnèrent sur moi, de tout leur poids pendant plusieurs mois.” III,12

Suit une citation du poète Horace :

Mista senum et juvenum densantur funera, nullum Saeva caput Proserpina fugit. qui signifie  « Jeunes et vieillard s’entassent, pêle-mêle, dans la tombe, Nulle tête n’échappe à la cruelle Proserpine » 

Montaigne élu maire de Bordeaux

C’est à Lucques, en Italie, après son tour d’Europe de 18 mois entrepris en 1580 que Montaigne apprend qu’il est élu maire de Bordeaux par une lettre en septembre 1581. Il envisage un temps de refuser sa nomination, mais se trouve vite contraint de l’accepter…

Plébiscité lors de son premier mandat, Montaigne est réélu à la tête de la mairie par les jurats de Bordeaux en 1583. Diplomate avisé, Montaigne administre sagement la ville, la préservant, autant qu’il le peut en ces temps troublés touchés par les guerres de religion et la peste. Il remplit son devoir de maire de 1583 à 1585.

Il écrit dans ses Essais : 

« Ces messieurs les « Jurats » de Bordeaux m’ont élu Maire de leur ville alors que je me trouvais loin de la France et encore plus Bordeaux éloigné d’une telle pensée. J’ai refusé, mais on me dit que j’avais tort, et le commandement du roi s’y ajouta. C’est une charge qui peut sembler d’autant plus belle qu’elle ne comporte ni rémunération, ni autre gain que l’honneur de l’exercer. Elle dure deux ans, mais elle peut être prolongée par une seconde élection, ce qui arrive très rarement. C’est pourtant ce qui arriva pour moi, et ne s’était produit que deux fois auparavant : pour Monsieur de Lansac il y a quelques années, et plus récemment pour Monsieur de Biron, Maréchal de France, à qui j’ai succédé. J’ai moi-même laissé la place à Monsieur de Matignon, lui aussi Maréchal de France. Je suis fier d’être en si bonne compagnie. »

A la suite, il cite Virgile : uterque bonus pacis bellique minister, ce qui signifie : “A la fois bon ministre de la paix et de la guerre.” 

Portrait physique de Michel de Montaigne

Michel de Montaigne était un homme de petite taille, de santé plutôt fragile. Il était frêle, chauve, et portait souvent une fraise autour du cou que l’on peut voir sur les portraits qui le représentent. Voici un extrait de ses Essais où il évoque son physique en se comparant à Socrate :

Socrate a été l’exemple parfait de toutes les grandes qualités. Je suis fâché qu’il ait été doté d’un corps et d’un visage si vilains, à ce que l’on en dit, et si peu en harmonie avec la beauté de son âme, alors que lui-même était si amoureux de la beauté et si attaché à elle. Nature lui a fait une grave injustice”. III,12

Montaigne se trouve plutôt charmant en comparaison : “J’ai une apparence favorable, aussi bien physiquement que par l’opinion qu’elle peut donner de moi”. 

Cette remarque est suivie de deux citations latines de Térence et du Pseudo-Gallus :

Quid dixi habere me ? Imo habui, Chreme! qui signifie : « Qu’ai-je dit ? que je l’ai ! Mais non, Chrémos, je l’eus ! » et Heu tantum attriti corporis ossa vides qui signifie « Hélas, tu ne vois que les os du corps qui sont usés. »

Montaigne ajoute ensuite : « Et cette apparence est tout le contraire de celle de Socrate. Il m’est arrivé souvent que par le seul fait de ma prestance et de mon allure, des gens qui ne me connaissaient pas du tout m’ont témoigné une grande confiance dans leurs propres aires comme à propos des miennes. Dans les pays étrangers, j’ai bénéficié pour cela des faveurs singulières et rares. » III,12 

Socrate :

Philosophe grec, Socrate est considéré comme le père de la philosophie morale. Il fut le maître de Platon et de Xénophon. Il est condamné à mort pour mépris de la religion et boit un poison, la ciguë pour mettre fin à ses jours. Socrate est condamné à mort par le tribunal de l’Héliée, à Athènes, en 399 avant J. -C. Plusieurs amis de Socrate proposent de le défendre, mais il refuse leur aide. Acceptant la sentence, bien que se défendant de l’accusation d’impiété, il boit volontairement la ciguë.

Lieux de Bordeaux liés à sa vie

Michel de Montaigne a vécu rue de la Rousselle avec sa famille pendant son enfance. C’est aussi un lieu où il a vécu lorsqu’il était maire de Bordeaux.  La rue de la Rousselle est une des rues les plus anciennes de Bordeaux.

Montaigne a travaillé au Parlement, dans le Palais de l’Ombrière, où il a rencontré Etienne de la Boétie. Ce lieu était le tribunal du roi de France. Il a totalement disparu aujourd’hui faute d’entretien mais une rue se nomme toujours “rue du palais de l’Ombrière”.

Annabelle, Eva, Mélissa, Rose

 

Épisode 2/8 : La “librairie” de Montaigne

 

LE CHÂTEAU MONTAIGNE

photo du château de Montaigne

Le Château de Montaigne est une demeure historique située dans le département de la Dordogne, en France. Il a été la résidence de Michel de Montaigne, un philosophe et écrivain français du XVIe siècle. Montaigne a vécu dans le château pendant la majeure partie de sa vie, et c’est là qu’il a écrit la plupart de ses célèbres Essais.

La librairie de Montaigne était un endroit spécial pour lui. C’était une petite tour dans le château, qui était remplie de livres, une collection qui s’élevait à environ 1 000 ouvrages. Montaigne aimait se retirer dans sa librairie pour lire, méditer et écrire. C’était son refuge, un endroit où il pouvait se concentrer et échapper aux distractions de la vie quotidienne.

photo de la bibliothèque de Montaigne actuelle
image 3d , reconstitution de la bibliothèque de Montaigne

Montaigne aimait les livres et la lecture. Il a étudié le droit, la théologie et les arts libéraux à l’université de Toulouse, mais il a rapidement abandonné ces études pour se consacrer à la lecture et à l’écriture. Pour Montaigne, les livres étaient des compagnons de vie, des sources de connaissance et de sagesse, mais aussi de divertissement et de réflexion.

Dans ses Essais, Montaigne a souvent évoqué sa passion pour les livres et sa librairie. Voici quelques extraits des Essais dans lesquels il parle de sa librairie :

  • “Je me tiens souvent enfermé tout seul dans ma librairie, tout occupé à méditer sur mes livres.” (Essais, Livre I, chapitre 8)

  • “Je ne cesse d’apprendre, autant que je le puis, pendant que je vis; et les moments les plus délicieux de ma vie sont ceux que j’emploie à étudier.” (Essais, Livre II, chapitre 10)

  • “Je suis comme les enfants qui se régalent des images des lions et des dragons et des diables.” (Essais, Livre III, chapitre 5)

  • “Je fais le tour de mes livres comme d’un domaine qui m’appartient.” (Essais, Livre III, chapitre 13)

  • “Je ne suis pas assez fou pour m’enfermer toute ma vie dans ma librairie.” (Essais, Livre III, chapitre 13)

photo de la tour de Montaigne

Ces extraits montrent la passion de Montaigne pour les livres et la lecture, ainsi que l’importance qu’il accordait à sa librairie. Pour lui, c’était un lieu de refuge et de méditation, où il pouvait se concentrer sur ses pensées et réflexions.

Sur le plafond ont été peintes, en noir sur fond blanc, des “sentences” grecques et latines, phrases brèves ou vers empruntés à des auteurs anciens, comme les vers suivants extraits d’une pièce de Sophocle :

ΟΡΩ ΓΑΡ ΗΜΑΣ ΟΥΔΕΝ ΟΝΤΑΣ ΑΛΛΟ ΠΛΗΝ ΕΙΔΩΛ ΟΣΟΙΠΕΡ ΖΩMΈΝ Η ΚΟΥΦΗΝ SKIAN

qui signifient « Nous, les vivants, ne sommes à l’évidence que fantômes, ombre(s) sans consistance ».

photo aérienne du château Montaigne

En visitant le Château de Montaigne, vous pouvez découvrir la librairie de Montaigne et vous plonger dans l’univers fascinant de ce grand penseur et écrivain.

 

Andreas, Eliott, Raphaël

 

Épisode 3/8 : Le  cénotaphe de Montaigne

 

Le cénotaphe de Michel de Montaigne  

Michel Eyquem de Montaigne est mort d’une tumeur de la gorge le 13 septembre 1592 à 59 ans au château de Sait-Michel-de-Montaigne (Dordogne). Selon un de ses amis, il est « parti chaleureusement ».

Le cénotaphe se trouve actuellement au Musée d’Aquitaine. C’est un  monument emblématique des collections bordelaises qui a été l’objet de plusieurs rénovations. Il a été classé monument historique en 1892.

A l’époque où le musée était une université, les étudiants étaient accueillis par le le cénotaphe de Montaigne qui était exposé sur la place centrale du hall d’entrée.

Il mesure 1m58 de haut et 2m23 de long.  Il a été commandé par Françoise de la Chassaigne, la veuve (Ancienne épouse dont le mari est décédé et qui ne s’est pas remariée ) de Montaigne aux sculpteurs Prieur et Grillermain vers 1593.

Sur le cénotaphe on voit  Montaigne vêtu d’une armure militaire du Moyen-Age, soulignant ainsi son appartenance à la noblesse alors qu’il n’était pas un soldat mais un intellectuel. C’est sa famille qui a fait ce choix, comme si la reconnaissance sociale importait plus que toute autre.. .

A ses pieds, on peut apercevoir un lion à deux langues symbolisant le courage mais aussi le fait que Montaigne maîtrise le grec et le latin, deux langues de culture, mais on pourrait y voir aussi bien une référence à ses deux langues maternelles : le latin et le gascon.

Le soubassement funéraire est richement orné d’éléments dans le goût de la Renaissance tardive et de l’art maniériste. Les rinceaux et volutes de feuillages de la partie inférieure supposent la main d’un ornementaliste de talent. Les armoiries de Montaigne prennent place sous les épitaphes. On y voit également des sculptures de têtes de mort et de pleureuses.

Sur le cénotaphe de Michel de Montaigne, se trouvent également des inscriptions en latin et en grec.

Inscription en latin

« A Michel de Montaigne, périgourdin, fils de Pierre, petit-fils de Grimond, arrière petit-fils de Raymond, chevalier de Saint Michel, citoyen Romain, ancien maire de la cité des Bituriges Vivisques, homme né pour être la gloire de la nature et dont les amours douces, l’esprit fin, l’éloquence toujours prête et le jugement incomparable ont été jugés supérieurs à la condition humaine, qui eut pour amis les plus grands rois, les premiers personnages de France, et même les chefs du parti de l’erreur, bien que très fidèlement attaché lui-même aux lois de la patrie et à la religion de ses ancêtres, n’ayant jamais blessé personne, incapable de flatter ou d’injurier, il reste cher à tous indistinctement, et comme toute sa vie il avait fait profession d’une sagesse à l’épreuve de toutes les menaces de la douleur, ainsi arrivé au combat suprême, après avoir longtemps et courageusement lutté avec un mal qui le tourmenta sans relâche, mettant d’accord ses actions et ses préceptes, il termine, Dieu aidant, une belle vie par une belle fin. »

Inscription en grec

« Qui que tu sois, qui en voyant cette tombe et mon nom, demande : Montaigne est-il donc mort ?(̓ΗΡΙΟΝ ὍΣΤΙΣ ἸΔΩΝ ἨΔ’ ὈΥΝΟΜΑΤ’ ̔ΟΥΜΟΝ, ἘΡΩΤΑΣ ΜΩΝ ΘΑΝΕ ΜΟΝΤΑΝΟΣ ; ΠΑΥΕΟ ΘΑΜΒΟΠΑΘΕΙΝ). Cesse de t’étonner : corps, noblesse, félicité menteuse, dignités, crédits, jouets périssables de la fortune, rien de cela n’était mien. Rejeton divin, je suis descendu du ciel sur la terre des Celtes, non point huitième sage de la Grèce, ni troisième de l’Ausonie, mais unique, égalant à moi seul tous les autres, et par la profondeur de ma sagesse, et par les charmes de mon langage, moi qui au dogme du Christ alliai le scepticisme de Pyrrhon. La jalousie s’empara de la Grèce ; elle s’empara de l’Ausonie, mais j’arrêtai moi-même cette rivalité jalouse en remontant vers ma patrie, en reprenant mon rang au milieu des esprits célestes  

La dépouille de Michel de Montaigne est actuellement dans un cercueil de métal sous le musée d’Aquitaine. Nous ne sommes sûr qu’à 95 % qu ‘il s’agit bien de lui !

Lucas, Gabriel, Maël

 

Épisode 4/8 : Les Essais de Montaigne

Les Essais de Montaigne

Buste de Montaigne, à la bibliothèque de Bordeaux

En 1572, Montaigne entreprend la rédaction des Essais, qu’il va enrichir au fil des années. L’œuvre évolue avec lui.

Les Essais est l’œuvre majeure de Michel de Montaigne ; elle fut publiée pour la première fois en 1580.

Les Essais sont répartis en trois livres. Dans le premier il se livre peu et note surtout des réflexions inspirées par ses lectures, tandis que danstroisième livre il se livre beaucoup plus, notamment sur sa maladie.

Les Essais ont été publiés trois fois :

– une première fois en 1580 avec les deux premiers volumes

– une seconde fois en 1588 avec le troisième volume

– puis une troisième fois en 1595 en édition posthume (écrite de façon plus simplifiée, adaptée à tous).

Photographie d’un exemplaire du tome 1 des Essais

Les Essais sont une sorte d’autoportrait à visée philosophique, pour mieux comprendre l’être humain et l’humanité. C’est le journal d’un homme à la recherche de la sagesse. Dans son œuvre, Montaigne fait preuve d’une modestie subtile malgré quelque orgueil.

C’est une œuvre humaniste. On y retrouve le besoin d’idées nouvelles, une élégance morale, une politesse et une courtoisie, un acte de foi dans la nature humaine et la conviction, pour reprendre la formule d’André Gide qu’« il n’y a d’art qu’à l’échelle de l’homme ». Montaigne s’efforce aussi de retrouver l’authenticité des Anciens.

Voltaire en parle comme du « charmant projet que Montaigne a eu de se peindre naïvement comme il a fait, car il a peint la nature humaine ». Les Essais se proposent de mieux comprendre l’être humain et l’humanité, ce n’est autre que l’essai des facultés naturelles qui sont en lui : « ce qui reste surtout unique , c’est cette façon de parler de soi sans la moindre gêne, sans sévérité excessive.»

Les Essais n’est pas une œuvre construite, elle assez décousue. L’œuvre traite de nombre de sujets, sans ordre apparent comme la médecine, les arts, les livres, ses affaires domestiques. Montaigne dit lui-même : « Je grappille par-ci, par-là dans les livres les sentences qui me plaisent ».

Il compare d’ailleurs son œuvre à un monstre, une sirène, en citant Horace, poète latin né le 8 décembre 65 av JC à Vénouse dans le sud de l’Italie et mort le 27 novembre 8 av J-C à Rome. : « Desinit in piscem mulier formosa superne » (« C’est le corps d’une belle femme, que termine une queue de poisson »).

Adèle, Amicie, Manel, Mathis

Épisode 5/8 : De l’éducation selon Montaigne

 

Comment Montaigne a-t-il été éduqué pendant son enfance ?

Une enfance paisible

Montaigne a reçu par ses parents une éducation paisible. On le réveillait par exemple avec des instruments de musique et « on avait conseillé à [son] père de [lui] faire apprécier la science et le devoir sans forcer [sa] volonté, mais en suivant [ses] désirs, et d’élever [son] âme en toute liberté et avec la plus grande douceur, sans rigueur, et sans contrainte ».

Le latin

Montaigne apprend le latin par un précepteur allemand employé par ses parents. Dans ces conditions et grâce à tous ses précepteurs qui ne parlaient avec lui qu’en latin,  il arrive à apprendre cette langue sans livres, sans méthodes et sans punitions. Il apprend ainsi un “latin pur” d’après lui. Le latin est devenue comme sa langue maternelle et il ne parlait que latin chez lui : « Quant au reste de la maison, c’était une règle inviolable que ni lui-même, ni ma mère, ni aucun valet ou chambrière ne me parlaient autrement qu’en latin, avec les mots que chacun avait appris pour cela. » Les métamorphoses d’Ovide est l’un des premiers livres qu’il a lu car il était approprié à son âge. Il a ensuite lu Virgile, Lucrèce, Catulle et Horace. Son livre préféré de l’Enéide de Virgile était il préférait le livre V. Une de ses autres lectures favorites est Plutarque. Il aimait beaucoup lire dans la grande bibliothèque de son château.

Quelles sont les meilleures méthodes d’enseignement ? Que doit-on enseigner aux enfants ?

Selon Montaigne, il ne faut pas apprendre “par cœur” car c’est « comme si l’on versait dans un entonnoir et [que] l’on nous demand[ait] seulement de redire ce que l’on nous a dit ». Pour lui, en apprenant par cœur, on ne se réfère pas au modèle. Il déteste l’éducation avec du « par cœur » car il pense qu’il vaut mieux réfléchir par soi-même.

L’histoire

Pour Montaigne, l’élève devra « fréquenter, par le biais des récits historiques, les grandes âmes des meilleurs siècles ». Il ajoute « C’est une étude qui peut paraître vaine à certains ; mais c’est aussi, pour d’autres, une étude dont le profit est inestimable : et c’est aussi la seule étude, comme le dit Platon, que les Lacédémoniens eussent conservée en ce qui les concerne ».

Les sciences

D’après lui, il n’est pas utile d’apprendre aux enfants toutes les sciences : “ la plus grande partie des sciences qui sont en usage se trouve au-delà de notre usage. Et dans celles dont nous nous servons, il y a des aspects et des détails très inutiles, que nous ferions mieux de laisser tels quels, […] C’est une grande sottise d’apprendre à nos enfants”. Il ajoute ensuite : « C’est une grande sottise d’apprendre à nos enfants la science des astres et le mouvement de la huitième sphère, avant de leur apprendre ce qui les concerne directement » et cite en grec des vers d’Anacréon qui signifient « Que m’importent à moi les Pléiades, Que m’importe la constellation du Bouvier ? »

Τί πλειάδεσσι κἀμοί ;

Τί δ’ ἀστράσι βοώτεω ;

La philosophie

Selon lui la philosophie est accessible à tous les individus, même aux enfants, contrairement à ce que pensent “même […] les gens intelligents » pour qui elle n’est « qu’un mot creux et chimérique » : “ On a grand tort de la décrire comme quelque chose d’inaccessible aux enfants, et de lui faire un visage renfrogné, sourcilleux et terrible”. Montaigne rapporte ensuite une anecdote qu’il a lue chez Démétrius. « Héracléon le Mégarique répondit : « c’est à ceux qui cherchent si le futur du verbe βάλλω a deux λ, ou qui cherchent la dérivation des comparatifs χεῖρον et βέλτιον et des superlatifs, χείριστον et βέλτιστον, qu’on voit plisser le front quand ils discutent de leur science. Mais les sujets philosophiques, d’ordinaire, égaient et réjouissent ceux qui les traitent, ils ne les attristent pas et ne leur font pas une mine renfrognée ! »

Le sport et la musique

Selon lui le sport et la musique sont aussi importants que les autres enseignements car ils leur sont complémentaires et forgent l’homme : “Ce n’est pas une âme, ce n’est pas un corps que l’on forme, c’est un homme. Et comme le dit Platon, il ne faut pas former l’un sans l’autre, mais les conduire ensemble au même pas, comme un couple de chevaux attelés à un même timon”. 

Pour conclure, selon Montaigne, les enfants doivent étudier beaucoup de matières pour construire leur futur.

Gabriel, Maxime, Oracio

 

Épisode 6/8 : De la lecture selon Montaigne

 

Montaigne et la lecture

Pourquoi Montaigne aime lire ?

Pour Montaigne la lecture est une distraction aux idées envahissantes. Quand le monde éveille votre questionnement sur des sujets importuns , vous n’avez qu’à ouvrir un livre et vous aurez votre dérivatif. Cette idée est plus ou moins exprimée dans ses Essais : « pour trouver un dérivatif à une idée importune il suffit de recourir aux livres » (III3).

De plus, Montaigne dit que la lecture l’aide à éveiller sa réflexion ainsi que son jugement. En effet, nombres d’auteurs dont il lit les ouvrages sont philosophes.

En revanche si la lecture l’aide pour sa réflexion et son jugement elle ne l’aide pas pour sa mémoire.

La manière dont Montaigne aime lire

 

Montaigne aime lire des livres faciles mais aussi plaisants, il lit ses livres de façon décousue. Il explique dans ses essais qu’il prends un livre dans sa bibliothèque en lit un passage puis en prends un notre et utilise le même procédé. Il ne lit pas ses livres avec un but précis, il en lit des passages et voit ou cela le mène. Il fait de même sans tenir compte de l’ordre dans lequel il lit ses livres.

Les lectures de Montaigne

Montaigne aime lire Virgile, Plutarque et Sénèque. Il trouve que les ouvrages de ces auteurs sont utiles mais aussi plaisants. Ces auteurs l’aide à améliorer son comportement ainsi que ses goûts selon ce qu’il écrit dans ses Essais.

Plutarque suit les idées de Platon comme la majorité des citoyens tandis que Sénèque suit des idées éloignées de « l’usage commun ».

Plutarque est un philosophe, biographe, moraliste et penseur, né en 46 après J.-C à Béotie en Grèce et il est mort en 125 à Delphes en Grèce. Il s’intéresse à la psychologie et à la politique.

Platon est un philosophe Athénien du Ve et IVe siècle avant J.-C.

Sénèque est un philosophe, dramaturge et homme d’état, né le 4 avant J.-C à Cordoue dans le sud de l’ Espagne et il est mort le 12 avril 65 après J.-C. Rome, Italie.

Selon Montaigne, l’auteur Cicéron a un bon sens philosophique mais une manière d’écrire ennuyeuse. Dans ses Essais il dit de ses ouvrages : « je n’y trouve que du vent ». Et en parlant de Platon il dit :« longuets les dialogues de Platon » ou « déplorer que cet homme, qui avait de bien meilleures choses à dire, passe autant de temps à ces discussions préparatoires si longues et tellement inutiles ? ».

Cicéron est un avocat, philosophe, orateur et écrivain, né le 3 janvier 106 avant J.-C à Aprinum en Italie. Il est mort assassiné le 7 décembre 43 avant JC à Formia en Italie .

L’une des citations grecque gravée dans la bibliothèque de Montaigne est la suivant :

ἐν τῷ φρονεῖν γὰρ μηδὲν ἥδιστος βίος, τὸ μὴ φρονεῖν γὰρ κάρτ᾽ ἀνώδυνον κακόν

« On mène une vie bien douce quand on ne pense à rien, car ne pas penser est un mal vraiment indolore. » (Sophocle, Ajax, 554-[555])

Cette citation est l’une des favorites de Montaigne. De plus, elle fait un parallèle avec l’utilité de la lecture pour Montaigne.

Ainhoa, Nina, Zackary

 

Épisode 7/8 : De la mort selon Montaigne

 

Montaigne et la mort

Montaigne frôle la mort

Dans le livre des Essais, Montaigne nous raconte son rapport à la mort et comment il l’a frôlée. Voici un petit résumé de la chute qui a failli lui coûter la vie.

Montaigne se promenait un jour sur un cheval « docile, mais pas très sûr ». Il voulu dépasser ses compagnons avec son cheval mais un homme et sa monture fonça sur lui. Cet homme voulait faire le malin et montrer de quoi lui et son cheval étaient capables.

Montaigne et l’homme furent tous les deux expulsés de leurs chevaux « cul par dessus tête ». Montaigne se retrouva étendu sur le dos, à plusieurs mètres de sa monture, incapable de faire un mouvement ou de ressentir quoi que ce soit. Les compagnons de Montaigne crurent qu’il était mort. Ils le ramenèrent chez lui mais il se réveilla peu après. A son réveil il vomit un seau entier de sang.

« Philosopher n’est autre chose que de se préparer à la mort »

Dans les Essais, Montaigne dit que la meilleure manière pour comprendre et voir la mort est de la frôler. Pour illustrer cette idée, il cite l’auteur latin Pline pour qui « chacun est pour soi-même un très bon sujet d’étude, pourvu qu’il soit capable de s’examiner de près ». Ainsi Montaigne s’est réconcilié avec la mort grâce à son accident.

L’auteur des Essais répète souvent par ailleurs qu’il faut tout le temps s’attendre à la mort car elle peut arriver à tout moment, comme le dit poète Horace latin, dont Montaigne cite deux vers : « Omnem crede diem tibi diluxisse supremum/Grata superveniet, quae non sperabitur hora » qui signifient « Imagine-toi que chaque jour est pour toi le dernier, /Et tu seras comblé par chaque heure que tu n’espérais pas ». Montaigne fait également référence à Socrate, philosophe grec du Ve siècle av. J.-C. : « Qu’est-ce que cela peut bien nous faire de savoir quand elle arrivera, puisqu’elle est inévitable ? À celui qui disait à Socrate : « Les trente tyrans t’ont condamné à mort », il répondit : « Eux, c’est la nature. »

Il nous fait clairement comprendre que la mort n’est pas quelque chose dont on devrait avoir peur mais plutôt qu’elle est notre destination finale à tous et que pendant notre vie, il faut préparer notre départ et non courir derrière des plaisirs éphémères. On peut aussi lire également dans les Essais que lorsque la mort touche un de nos proches, nous sommes ravagés, tristes, et en colère mais que l’on voit ainsi réellement qu’à tout moment la mort peut nous toucher. Nous sommes des « hommes d’argile », Κεραμος ανθρωπος, comme le dit Erasme dont les mots en grec sont peints sur le plafond de la bibliothèque de Montaigne. Selon Montaigne donc, philosophe c’est « nous apprendre à ne pas craindre de mourir. » et non pas avoir peur d’elle et refuser d’y penser comme le font la plupart des gens : « Le remède du vulgaire, c’est de ne pas y penser ». « Envisager la mort, c’est envisager la liberté » : si on se prépare à la mort, on se sera pas surpris pas celle-ci.

Bérénice, Ghaniya, Julie, Violette

Épisode 8/8 : De l’amitié selon Montaigne

 

Montaigne et La Boétie

Montaigne avait une conception bien particulière de l’amitié. En effet, l’amitié était un sujet qu’il affectionnait tout particulièrement, à tel point qu’il y a même consacré un chapitre entier de sa célèbre œuvre : Les Essais. Il cite par exemple l’auteur latin Cicéron : «Omnino amicitiae, corroboratis jam confirmatisque ingeniis et aetibus judicandae sunt” qui signifie “On ne peut pleinement juger des amitiés que lorsque, avec l’âge, les caractères se sont formés et affermis”. Il y a un ami qui prendra une place toute particulière dans son coeur.

Montaigne avait à l’égard d’Etienne une attention particulière. En effet, comme il le dit dans les Essais, Montaigne considérait La Boétie comme un frère : “C’est en vérité un beau nom, et plein d’affection que le nom de frère”. Etienne de la Boetie était un  ami tellement important pour Montaigne que celui-ci lui consacra des  chapitres entiers dans les Essais. On peut voir par exemple un exemplaire des Essais conservé à la bibliothèque de Bordeaux dans lequel on peut voir des annotations écrites par Montaigne sur son amitié avec Etienne de la Boetie. C’est dans ces annotations que l’on peut lire la phrase « Si l’on me presse de dire pourquoi je l’aimais, je sens que cela ne se peut exprimer que ” Parce que c’était lui, parce que c’était moi. » 

Fils d’Antoine de La Boétie, un lieutenant particulier du sénéchal du Périgord, Étienne de La Boétie grandit dans une famille de magistrats, un milieu éclairé dont l’entourage est principalement composé de bourgeois cultivés. Etienne de la Boetie est né le premier Novembre 1930 dans la ville de Sarlat. Il étudie au collège de Guyenne. Nous savons qu’il est encore extrêmement jeune à la mort de son père. Son oncle, monsieur de Bouilhonnas, s’occupe de lui pour le reste de son enfance et se charge de l’éduquer. Étant professeur et prêtre, il prend en charge son éducation. Il est pour son neveu un second père, ce qui fait dire à Étienne qu’il lui doit son institution et tout ce qu’il est et pouvait être.

Avant même de rencontrer Montaigne, Étienne se passionne pour l’écriture. Il commence à se faire connaître en rédigeant vingt neuf sonnets amoureux. Après cette étape de sa vie, il devient le traducteur des ouvrages de Plutarque, Virgile et d’Arioste. Par la suite, il entame des études de droit à l’université d’Orléans où il passe son examen de licence en Droit Civil le 23 septembre 1553. C’est pendant cette période qu’il écrit l’ouvrage qui le fera réellement connaître, le discours de la servitude volontaire ou le Contr’un. Ce court réquisitoire contre la tyrannie surprend par son érudition et sa profondeur. Il pose la question de la légitimité de toute autorité sur une population et essaie d’analyser les raisons de la soumission de celle-ci.

C’est  lorsqu’il travaille au parlement qu’il rencontre Montaigne. La Boétie en est un conseiller bien établi alors que Montaigne, venu d‘une juridiction plus modeste de Périgueux, y est à peine accepté.

Durant le reste de sa courte vie, De la Boétie se lie de plus en plus d’amitié avec Montaigne, au point que certaines rumeurs iront même jusqu’à dire que les deux hommes étaient amants. Mais comme dit précédemment, sa vie a été malheureusement courte. En effet, le 8 août 1563, des maux terribles torturent La Boétie. D’après les médecins “C’est un flux de ventre avec des tranchées.” Il s’agit sans doute d’une tuberculose, maladie très fréquente à l’époque. Sur son lit de mort, La Boétie confie à Montaigne une ultime requête, celle de publier l’édition de ses œuvres qu’il n’avait pas eu le temps de publier. Etienne de la Boétie est mort près de Bordeaux, dans la commune qui est aujourd’hui le Taillan-Médoc, le 15 août 1563, à 32 ans. C’est un âge précoce pour mourir, même à cette époque, où les conditions de vie étaient moins bonnes qu’aujourd’hui et où l’espérance de vie n’était pas aussi grande.

Montaigne a écrit une lettre à son père au sujet de la mort de son ami. Il y témoigne l’admiration qu’il lui a voué jusqu’au bout :  « Car sans doute je ne le vis jamais plein ni de tant et de si belles  imaginations, ni de tant d’éloquence, comme il a été le long de cette  maladie ». 

Jocelyn, Lili-Rose, Rose, Sandre

 

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