Simone Veil, par Ellyn 5A

Simone Veil, par Ellyn 5A

20 février 2022 Non Par CDI

1.Simone Veil, une politicienne qui combat au nom des femmes

Simone Veil, née le 13 juillet 1927 à Nice et décédée le 30 juin 2017 à Paris, est une femme magistrate et une femme d’état française.

Magistrate : fonctionnaire ou officier civil investi d’une autorité juridictionnelle, administrative ou politique (Source : Dictionnaire Larousse).

Simone Veil est juive avec des origines lorraines. Elle est déportée à Auschwitz, à l’âge de 16 ans, durant la Shoah où elle y perd ses parents et son frère.

Shoah : La Shoah est l’expression qu’on utilise pour désigner le génocide d’environ cinq à six millions de Juifs qui a été perpétré par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). Ce terme signifie « catastrophe » en hébreu. (Source : Wikimini).

Rescapée avec ses deux sœurs, Simone épouse Antoine Veil en 1946.

Elle étudie les droits et la science politique, ce qui lui permet d’entrer dans la magistrature comme haut fonctionnaire.

En 1974, elle est nommée ministre de la Santé par le président Valéry Giscard d’Estaing. Elle permet le remboursement de la pilule contraceptive par la sécurité sociale. Elle met aussi en place des aides financières à destination des mères d’enfants en bas âge

Le 19 janvier 1975, la « loi Veil » entre en vigueur. Il s’agit d’une loi relative à l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) rendant l’avortement légal et accessible en France.

Ses actions, remises dans le contexte de l’époque, représentaient une grande avancée quant à l’indépendance de la femme dans la société française. Simone Veil est l’icône de la lutte contre la discrimination des femmes. Son combat pour le droit des femmes lui vaudra des menaces de l’extrême droite.

C’est la première présidente du Parlement Européen, poste qu’elle occupe de 1979 à 1982.

Elle est considérée comme l’une des promotrices de la réconciliation franco-allemande et de la construction européenne.

De 1993 à 1995, elle est ministre d’État, ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville, au sein du gouvernement Edouard Balladur. Elle siège au Conseil constitutionnel de 1998 à 2007 avant d’être élue à l’Académie française en 2008. En 2009, le Président Nicolas Sarkozy l’érige au rang de Grand officier de la Légion d’honneur.

Conseil constitutionnel : Institution française créée par la Constitution de la Cinquième République du 4 octobre 1958. Il se prononce sur la conformité à la Constitution des lois et de certains règlements dont il est saisi. Il veille à la régularité des élections nationales et référendums (Source : Wikipédia).

Académie française : Institution de France fondée le 13 mars 1634, sous le règne de Louis XIII, par le cardinal de Richelieu. Sa mission est de fixer la langue française, de lui donner des règles, de la rendre compréhensible par tous (Source : Vikidia).

Le 1er juillet 2018, soit un an après son décès, le Président Emmanuel Macron décide de faire entrer Simone et son mari Antoine Veil au Panthéon.

2. Une rescapée de plusieurs camps

L’offensive allemande en 1940, la rapide défaite de l’armée française et l’armistice viennent mettre fin à son enfance niçoise. Le premier statut des Juifs est annoncé et le père de Simone, l’architecte André Jacob, se voit retirer le droit d’exercer son métier.

Les enfants Jacob, hébergés chez différents amis, doivent quitter le lycée, ce qui n’empêche pas Simone de passer son baccalauréat en mars 1944. Elle est arrêtée le lendemain, suivie par les autres membres de sa famille, hormis sa sœur Denise, engagée dans la Résistance, qui sera arrêtée plus tard et déportée à Ravensbrück avec d’autres « politiques », d’où elle reviendra. Simone, sa mère Yvonne et sa sœur Madeleine sont déportées à Auschwitz le 15 avril 1944, tandis que son frère Jean et son père sont conduits en Lituanie où ils sont rapidement assassinés.

Simone Veil survit grâce à son arrivée tardive et en bonne santé dans le camp d’extermination. Elle échappe ainsi à la première sélection, immédiate, pour les chambres à gaz (pièce hermétiquement fermée dans laquelle un gaz toxique ou asphyxiant est introduit).

Dans son autobiographie Une Vie, publiée en 2007, Simone Veil raconte son arrivée au camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz-Birkenau le 15 avril 1944 : 

« Le convoi s’est immobilisé en pleine nuit. Avant même l’ouverture des portes, nous avons été assaillis par les cris des SS et les aboiements des chiens. Puis les projecteurs aveuglants, la rampe de débarquement, la scène avait un caractère irréel. On nous arrachait à l’horreur du voyage pour nous précipiter en plein cauchemar. Nous étions au terme du périple, le camp d’Auschwitz-Birkenau.

Les nazis ne laissaient rien au hasard. Nous étions accueillis par des bagnards que nous avons aussitôt identifiés comme des déportés français. Ils se tenaient sur le quai en répétant : « Laissez vos bagages dans les wagons, mettez-vous en file, avancez. » Après quelques secondes d’hésitation, tout le monde s’exécutait. […] Vite, vite, il fallait faire vite. Soudain, j’ai entendu à mon oreille une voix inconnue me demander : « Quel âge as-tu ? » A ma réponse, 16 ans et demi, a succédé une consigne : « Surtout dis bien que tu en as 18. » […]

La file est arrivée devant les SS qui opéraient la sélection avec la même rapidité. Certains disaient : « Si vous êtes fatigués, si vous n’avez pas envie de marcher, montez dans les camions. » […]

Nous avons marché avec les autres femmes, celles de la « bonne file », jusqu’à un bâtiment éloigné, en béton, muni d’une seule fenêtre, où nous attendaient les kapos ; des brutes, même si c’étaient des déportées comme nous, et pas des SS. […] Nous avons tout donné, bijoux, montres, alliances. […]

Après cela, plus rien, pendant des heures, pas un mot, pas un mouvement jusqu’à la fin de la nuit, entassées dans le bâtiment. Celles qui avaient été séparées des leurs commençaient à s’inquiéter, se demandant où étaient passés leurs parents ou leurs enfants. Je me souviens qu’aux questions que certaines posaient les kapos montraient par la fenêtre la cheminée des crématoires et la fumée qui s’en échappait. Nous ne comprenions pas ; nous ne pouvions pas comprendre. Ce qui était en train de se produire à quelques dizaines de mètres de nous était si inimaginable que notre esprit était incapable de l’admettre. Dehors, la cheminée des crématoires fumait sans cesse. Une odeur épouvantable se répandait partout. Nous n’avons pas dormi cette nuit-là. »

Extrait du chapitre “l’enfer”, pp.52-55.

En juillet 1944, sa mère, sa sœur et elle sont transférées à Bobrek. Lors de l’évacuation du camp de Bobrek, le 18 janvier 1945, les Allemands emmènent leurs prisonniers dans une «marche de la mort » de 70 kilomètres de Bobrek à Gleiwitz. Les marches de la mort eurent lieu à la fin de la guerre. Comme les Alliés se rapprochaient, les nazis organisèrent les transferts des détenus vers d’autres camps afin de poursuivre le processus de concentration en Allemagne. Les prisonniers, déjà affaiblis par le travail, les privations ou les maladies risquaient la mort au cours de ces longues marches d’un camp vers un autre.

Simone Veil témoigne de l’horreur de ses transferts dans son autobiographie (pp.82-84) : 

« Soudain, l’avancée des troupes soviétiques fit paniquer les autorités allemandes. […] Le 18 janvier 1945, le commando de Bobrek reçut l’ordre de départ. Nous sommes donc partis à pied pour l’usine Buna, située dans l’enceinte d’Auschwitz-Birkenau. Nous y avons rejoint tous les autres détenus des camps d’Auschwitz, environ quarante mille personnes, et avons entamé cette mémorable longue marche de la mort, véritable cauchemar des survivants, par le froid de quelques trente degrés en dessous de zéro. Ce fut un épisode particulièrement atroce. Ceux qui tombaient étaient aussitôt abattus.[…]

Enfin, nous sommes parvenus à Gleiwitz, à soixante-dix kilomètres plus à l’ouest, je dis bien soixante-dix, où s’opérait le regroupement des déportés qui avaient réussi à survivre. La proximité croissante des troupes soviétiques affolait tellement les Allemands que nous nous sommes alors demandé si nous n’allions pas être exterminés. Nous attendions notre sort, hommes et femmes mélangés dans ce camp épouvantable où il n’y avait plus rien, aucune organisation, aucune nourriture, aucune lumière.

Nous avons été dirigées sur Mauthausen (camp de concentration et d’extermination en Autriche) où le camp n’a pu nous accueillir faute de place. Nous sommes alors reparties pour huit jours de train […] Lorsque notre convoi a traversé les faubourgs de Prague, les habitants frappés par (…) cet entassement de morts vivants nous ont jeté du pain depuis leurs fenêtres. Pourquoi les nazis n’ont-ils pas tué les Juifs sur place ? […] Pour ne pas laisser de traces derrière eux. […]

Notre convoi a roulé jusqu’au camp de Dora, commando de Buchenwald. […] Bon nombre d’entre nous avaient péri durant le voyage. C’était un camp pour hommes,, très dur, où les déportés travaillaient au fond d’un tunnel à la fabrication des V2 (missiles). […] Après deux jours d’angoisse, le petit groupe de femmes dont nous faisions partie a été expédié à Bergen-Belsen, entre Hambourg et Hanovre, au nord de l’Allemagne […] Nous sommes arrivées le 30 janvier 1945 ».

Entre le 18 et le 30 janvier 1945, Simone Veil est passée par les camps de Bobrek (à six kilomètres environ d’Auschwitz-Birkenau), d’Auschwitz, de Gleiwitz (en Pologne), de Mathausen (en Autriche), de Dora, avant d’arriver au camp de Bergen-Belsen (en Allemagne) avec sa mère et sa sœur. Ces transferts se sont effectués dans des conditions inhumaines, par un froid glacial. Les déportés souffraient de la faim et de la maladie et beaucoup moururent durant ce trajet.

Source de l’image : Wikimedia commons.

3. Le camp de Bergen-Belsen

A l’approche des Alliés et des forces soviétiques fin 1944 et début 1945, Bergen-Belsen est un camp de regroupement pour des milliers de prisonniers juifs évacués des camps les plus proches du front. L’arrivée de milliers de nouveaux prisonniers, dont beaucoup étaient des survivants des marches forcées, épuisèrent les maigres ressources du camp.

Simone est postée à la cuisine. Sa sœur Madeleine, très malade, est sauvée de justesse grâce à l’arrivée des Alliés. Malheureusement, sa maman décède à cause du typhus en mars 1945.

Le 17 avril 1945, Bergen-Belsen est libéré par les troupes britanniques

En 1988, France Culture a fait un documentaire où Simone Veil témoigne de l’horreur de ces derniers mois de détention. Près de 50 000 personnes sont décédées à Bergen-Belsen à cause du typhus, de la faim, de l’épuisement, du désespoir, dont Anne Frank et la mère de Simone. 

Dans son autobiographie, Simone Veil témoigne du quotidien au camp de Bergen-Belsen où elle fut prisonnière du 30 janvier jusqu’à la libération du camp le 17 avril 1945 :

« Il n’y avait plus d’encadrement administratif, presque pas de nourriture, pas le moindre soin médical. L’eau, (…) faisait défaut. Et comme si tout cela ne suffisait pas au malheur des silhouettes squelettiques qui erraient à la recherche de nourriture, une épidémie de typhus s’était déclarée. […] L’enlèvement des cadavres n’était plus assuré, de sorte que les morts se mêlaient aux vivants. Dans les dernières semaines, […] des cas de cannibalismes apparurent. Hormis quelques S.S, les allemands ne s’occupaient plus du camp. Bergen-Belsen était devenu le double symbole de l’horreur de la déportation et de l’agonie de l’Allemagne. […]

Le travail à la cuisine était aussi rude que la vie dans le reste du camp […] Je ne dormais que deux ou trois heures par nuit, en raison des alertes incessantes. […] Je dormais en marchand. […]

Bergen-Belsen a été libéré le 17 avril 1945. Nous étions libérées mais pas encore libres. Dès leur entrée dans le camp, les Anglais avaient été effarés par ce qu’ils découvraient : des masses de cadavres empilés les uns sur les autres, et que des squelettes vivants tiraient vers des fosses. Les risques d’épidémie amplifiaient cette apocalypse. Le camp a aussitôt été mis en quarantaine. La guerre n’avait pas encore été finie et les Alliés ne voulaient prendre aucun risque sanitaire ».

Simone, Madeleine et Denise sont les seules survivantes de la famille, puisque leur père, leur mère et leur frère ne sont pas revenus des camps.

Après son retour en France, elle se tient prête à parler, mais a l’impression que presque personne ne veut l’entendre.

4. Simone Veil, le retour

Simone Jacob est de retour en France le 23 mai 1945 à Paris. Elle apprend qu’elle a été reçue au baccalauréat.

Elle s’inscrit, en 1945, à la faculté de Droits de Paris et à l’institut d’études politiques de Paris. Elle rencontre, durant un séjour au ski, Antoine Veil, son futur mari. Il deviendra inspecteur des finances et chef d’entreprise. Ils se marient le 26 octobre 1946.

Sa sœur Madeleine meurt avec son fils Luc en 1952, à la suite d’un accident de voiture, alors qu’elle rentrait de Stuttgart où elle était allée rendre visite à Simone. Ce nouveau drame est vécu douloureusement, puisque Madeleine était la seule personne avec qui elle pouvait parler et partager l’expérience de la déportation.

Du mariage de Simone et Antoine naissent trois fils :

– Jean (né le 26 novembre 1947), avocat d’affaires.

– Claude-Nicolas, médecin (1948-2002).

– Pierre François (né le 16 mars 1954), avocat et président du Comité français, marié avec Agnès Buzyn, ancienne Ministre des Solidarités et de la Santé (du 17 mai 2017 au 16 février 2020).

Simone et Antoine, sont les grands-parents de 9 petits enfants :

– Lucas Veil                              – Isabelle Veil                                      – Judith Veil

– Raphaël Veil                          – Stéphanie Veil                                  – Valentine Veil

– Déborah Veil                         – Mathias Veil                                      – Constance Veil

 

SOURCES :

-Encyclopédia universalis, “VEIL, Simone”, disponible en ligne :

https://www.universalis.fr/encyclopedie/simone-veil/

-Wikipédia, “Simone Veil”, disponible en ligne : 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Simone_Veil

-France Culture, “Simone Veil témoigne des camps”, 1988, disponible en ligne : https://www.franceculture.fr/histoire/simone-veil-temoigne-de-la-liberation-des-camps-cest-si-bete-de-mourir-maintenant

-COLIN, Fabrice, Rester debout, Albin Michel, 2018, 320 pages, disponible au CDI.

 

-Extraits d’Une jeunesse au temps de la Shoah, de Simone Veil, le Livre de Poche, 2010, 192 pages. Ce livre est un extrait d’Une vie, autobiographie écrite par Simone Veil et publiée en 2007, disponible au CDI.

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